Une étude commandée par Cœur + AVC révèle que la consommation d’aliments ultra-transformés au Canada représente près de la moitié des calories ingérées au quotidien.
Jean-Claude Moubarac, professeur adjoint à l’Université de Montréal, explique dans ce rapport les liens entre habitudes alimentaires, consommation d’aliments ultra-transformés, qualité nutritionnelle et état de santé de la population au Canada. Il propose des recommandations pour améliorer les choix et les pratiques alimentaires et culinaires.
La Classification NOVA : des aliments frais aux produits ultra-transformés
Aujourd’hui, de nombreux chercheurs utilisent la classification NOVA pour étudier les enjeux reliés à la consommation des aliments transformés. Créée lors de l’élaboration du nouveau guide alimentaire brésilien, reconnue par la FAO et la Pan American Health Organisation, cette catégorisation classe en 4 groupes les aliments selon leur degré de la transformation :
- Les aliments frais ou minimalement transformés: légumes, fruits, légumineuses, fines herbes, viande et volaille, lait pasteurisé, yogourt nature, œufs, riz, maïs, farines, pâtes alimentaires, thé, café, eau.
- Les ingrédients culinaires transformés : sel, sucre, mélasse, miel, huiles végétales, beurre, saindoux etc.
- Les aliments transformés par cuisson et procédés de conservation : fromages, pains, légumineuses, fruits et légumes en conserve, noix salées/sucrées, viande et poisson fumés.
- Les aliments ultra-transformés : issus de formulations industrielles à base de substances extraites ou dérivées des aliments et contenant des additifs qui imitent les qualités sensorielles des aliments frais. On trouve dans ce groupe : boissons sucrées, confiseries, biscuits, gâteaux, grignotines salées et sucrées, margarine, sauces, viandes reconstituées, hamburger, pizza.
Ce rapport démontre l’effet pervers de cette ultra-transformation. Ces produits peu nutritifs et attirants, contiennent un taux élevé de sel, sucre et gras, mais peu de protéines, fibres, minéraux et vitamines. Ils plaisent car ils sont pratiques, de longue conservation, prêts à l’emploi, économiques et savoureux. De plus, ils sont très valorisés par le marketing alimentaire, notamment auprès des enfants.
Portrait de la consommation Canadienne des produits ultra-transformés
Jean-Claude Moubarac a utilisé la classification NOVA et les données 2015 de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (Statistique Canada 2015) pour dresser le portrait des consommateurs canadiens :
- Globalement, l’apport calorique quotidien des aliments ultra-transformés s’élève à 48,3 % contre 39,2 % pour les aliments non transformés ou minimalement transformés.
- Comparés à une étude précédente, les pourcentages ont peu évolué depuis 2004. Cependant, on note une augmentation de la consommation de céréales sucrées, de boissons sucrées à base de produits laitiers, de charcuteries et de plats prêts-à-manger. D’autres données attestent que cette proportion d’aliments ultra-transformés a plus que doublé en 70 ans.
- Ce taux élevé de produits ultra-transformés concernent tous les Canadiens, quel que soit le statut socio-économique.
- Fait inquiétant, les jeunes s’avèrent les plus grands consommateurs : 57,2 % pour les enfants de 9 à 13 ans et 54,7 % pour les adolescents de 14 à 18 ans.
- À noter les grandes variabilités interindividuelles : si certains canadiens consomment modérément ces produits, d’autres en font leur principale source de choix alimentaires.
- Influence de la culture : les Canadiens de naissance choisissent plus souvent ces aliments (51,6 %) que les citoyens issus de l’immigration récente (37,8%).
Améliorer les choix alimentaires et les pratiques culinaires
Les aliments et les boissons ultra-transformés affichent une moindre qualité nutritionnelle. Ainsi, plus on consomme ces produits, plus la qualité globale de l’alimentation diminue. Par ailleurs, quand l’apport calorique provient en majorité de ces produits, la portion des aliments frais (fruits et légumes), peu transformés et plus nutritifs reste faible.
Ainsi, Jean-Claude Moubarac propose des recommandations pour valoriser une alimentation de qualité :
- La population devrait consommer plus souvent des aliments frais et peu transformés et cuisiner simplement à la maison.
- Les consommateurs devraient choisir des magasins et des restaurants offrant une variété de produits frais, et éviter l’achat de produits ultra-transformés.
- Dans la vie familiale et sociale, il devient essentiel de prendre le temps pour la planification des repas, les activités culinaires, les moments à table en bonne compagnie dans un environnement agréable.
- Chacun aurait intérêt à développer des compétences nutritionnelles et culinaires, et à être critique face au marketing alimentaire, et en particulier de ne pas exposer les enfants à la publicité.